
Octobre Rose, l’équivalent anglo-saxon du National Breast Cancer Awareness Month, est une campagne mondiale de sensibilisation au cancer du sein chez les femmes. Cette initiative a été lancée par Evelyn Lauder, belle-fille de la fondatrice du groupe Estée Lauder.
Au cours de leur vie, une femme sur huit1 dans le monde est susceptible de développer un cancer du sein. En France, en 2023, on estime à 61 214 le nombre de nouveaux cas2, soit environ 33 % de tous les cancers féminins1. Parmi ces patientes, 87 % peuvent aujourd’hui être guéries1, grâce aux efforts permanents des médecins, aux travaux des chercheurs et aux avancées technologiques.
Selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), environ 2,3 millions de femmes3 ont été diagnostiquées avec un cancer du sein dans le monde en 2022. Parmi elles, environ 61 000 vivaient en France, soit près de 2,6 % du total mondial, avec un âge médian de 64 ans2 au moment du diagnostic. À l’échelle mondiale, on a dénombré 670 000 décès3 liés à ce cancer, dont environ 12 750 en France2 (soit ≈ 1,9 %), avec un âge médian au décès d’environ 74 ans2.
Le pays le plus touché en termes de taux d’incidence standardisés selon l’âge est l’Australie, suivie de près par la Nouvelle-Zélande, avec respectivement 100,34 et 95,544 cas pour 100 000 femmes. En revanche, si l’on considère le nombre absolu de nouveaux cas, la Chine arrive en tête avec environ 357 000 cas5, suivie des États-Unis (274 000 cas5) et de l’Inde (192 000 cas5) en 2022.
À l’inverse, les pays les moins touchés selon les taux d’incidence standardisés sont le Bhoutan (5 cas pour 100 000 femmes)6, la Mongolie (≈ 8 cas)7 et la Gambie (≈ 11 cas)6. En France, le taux d’incidence standardisé est d’environ 105,4 nouveaux cas pour 100 000 femmes8.
Il est important de noter que ces chiffres peuvent être influencés par divers facteurs, tels que le taux de dépistage, l’accès aux soins, les habitudes de vie et la structure démographique des populations. Par exemple, l’Australie et la Nouvelle-Zélande bénéficient de programmes de dépistage bien établis, ce qui contribue à une détection précoce et à des taux d’incidence plus élevés.
Quels sont les premiers signes de ce cancer ?
Les premiers symptômes de détection sont multiples, parmi lesquels :
- Changements au niveau du sein: grosseur, zone dure, épaississement, etc.
- Modifications de la peau: plissement, rougeur, chaleur, aspect « peau d’orange », etc.
- Modifications du mamelon: inversion récente, écoulement anormal, croûtes persistantes, etc.
- Changements de taille ou de forme: augmentation ou diminution par rapport à l’autre sein.
Attention : la présence de l’un de ces signes ne signifie pas automatiquement un diagnostic de cancer. Ces symptômes peuvent aussi être liés à un kyste ou à une infection.
Toute anomalie persistante doit être examinée par un médecin ou dans un centre de dépistage.
Mais le dépistage régulier (mammographie, examen clinique) reste le meilleur moyen de détecter un cancer du sein à un stade précoce, souvent avant l’apparition de symptômes. Selon une estimation de Santé publique France en 2023, environ 2 620 500 femmes9 ont participé au programme de dépistage organisé du cancer du sein, ce qui représente un taux de participation de 48,2 %9 de la population cible (femmes de 50 à 74 ans).
Il faut y ajouter environ 10 à 15 %10 des femmes de cette tranche d’âge qui se font dépister de manière individuelle, soit 500 000 à 700 000 mammographies10 par an.
Ainsi, le nombre total estimé de mammographies réalisées en France se situe entre 3,1 et 3,4 millions par an.
IA, imagerie avancée et découvertes biologiques : vers un dépistage plus efficace
Comme dans de nombreux domaines, l’Intelligence Artificielle (IA) améliore le diagnostic précoce du cancer du sein. Selon l’étude suédoise MASAI, les algorithmes d’IA intégrés aux mammographies détectent ≈ 20 % de cancers en plus que la méthode standard (lecture double par deux radiologues), sans augmenter significativement les faux positifs.
- L’étude a porté sur unéchantillon de 80 033 femmes11, réparties de façon équilibrée : 49,98 % dans le groupe avec IA et 50,01 % dans le groupe standard.
- Letaux de détection est passé de 5 cancers pour 1 000 femmes12 dans le groupe standard à 6 cancers pour 1 00012 dans le groupe bénéficiant de l’IA.
- Les résultats ont montré uneaugmentation de 9,01 % des cas détectés11 grâce à l’IA, ainsi qu’une réduction de 44 % de la charge de travail des radiologues 11.
- L’IA peut également être utilisée pouranalyser les images échographiques grâce à des modèles de deep learning, très performants pour différencier lésions bénignes et malignes, particulièrement utile dans les seins denses, où la mammographie est moins efficace.
L’imagerie avancée permet également d’améliorer le diagnostic grâce à la tomosynthèse mammaire numérique (TMN). Cette technique offre une meilleure visualisation des structures mammaires, réduit le chevauchement des tissus et permet ainsi d’identifier plus facilement les anomalies, tout en diminuant les rappels inutiles.
- Une étude duBreast Cancer Surveillance Consortium a montré que la TMN est associée à une réduction de 15 % du taux de rappels13, tout en augmentant le taux de détection des cancers de 21 %13 par rapport à la mammographie numérique 2D.
- Une étude prospective en Suède a révélé que la TMNaugmente le taux de détection des cancers invasifs de 43 %14, avec une réduction significative des cancers avancés détectés.
Ces résultats suggèrent que la TMN pourrait jouer un rôle plus important dans les recommandations de dépistage, notamment pour les femmes ayant des seins denses.
Par ailleurs, une découverte récente du laboratoire du Dr Clara Nahmias, l’un de nos partenaires, a mis en évidence une protéine nommée ATIP3, présentant des effets anti-cancer et anti-métastatiques. L’équipe a démontré que cette protéine exerce une action protectrice contre le cancer du sein, et que sa déficience est associée à une diminution de l’espérance de vie des patientes.
Pour cette récente découverte, le Dr Clara Nahmias a été récompensée à deux reprises : d’abord par la médaille de bronze du CNRS, puis par le Prix du Ruban Rose, décerné par l’association Estée Lauder.
Disparités régionales du cancer du sein en France : une situation préoccupante
Selon le Rapport Annuel d’Activité 2023 du CRCDC-IDF, l’Île-de-France est la région la plus touchée par le cancer du sein, avec 328 700 mammographies réalisées15 dans le cadre du dépistage organisé en 2023. Le taux de participation des femmes éligibles s’élève à 36,4 %15, inférieur à la moyenne nationale de 34,2 %15 pour la même période.
À l’inverse, selon Santé Publique France, la Bourgogne-Franche-Comté présente le taux d’incidence le plus bas pour le cancer du sein féminin en France. Entre 2007 et 2016, le taux d’incidence standardisé était de 89 cas pour 100 000 femmes16, contre 98 cas pour 100 00016 au niveau national.
En revanche, la région des Hauts-de-France, et plus particulièrement le Nord-Pas-de-Calais, enregistre le taux d’incidence le plus élevé pour ce cancer. Le taux standardisé est de 114,9 cas pour 100 000 femmes16, bien supérieur à la moyenne nationale d’après l’APM News.
Ces disparités régionales peuvent être attribuées à divers facteurs, notamment les comportements à risque, les habitudes alimentaires, l’environnement et l’accès aux soins. Par exemple, les Hauts-de-France présentent une surmortalité importante par cancer du sein chez les femmes, avec un taux de décès supérieur de 25 %16 à la moyenne nationale, rajoute l’ARS des Hauts-de-France.
Il est essentiel de poursuivre les efforts de prévention et de dépistage afin de réduire ces inégalités. Le programme national de dépistage organisé du cancer du sein (PNDOCS) propose, via une invitation tous les deux ans, une mammographie aux femmes âgées de 50 à 74 ans. Cependant, la participation reste insuffisante pour atteindre les objectifs européens de 70 % de couverture17.
L’accompagnement vers la guérison
Les femmes atteintes par ce type de cancer bénéficient d’une prise en charge personnalisée, coordonné par une équipe pluridisciplinaire, du diagnostic jusqu’au suivi post-traitement. Cette approche recherche à adopter les traitements aux besoins de chaque patiente, y compris de facteurs tels que le type de cancer, le stade de la maladie et l’état général de la patiente.
Dans l’accompagne se trouve des soins de support qui sont essentiels pour améliorer la qualité de vie des patientes pendant et après les traitements. Voici la liste des soins, ci en-dessous :
- Soutien psychologique : consultations en spycho-oncologie pour faciliter les émotions face à la maladie.
- Onco-esthétique : un accompagnement pour faire face aux effets secondaires liés aux traitements, comme la perte de cheveux.
- Proposition d’une activité physique adaptée : programme pour maintenir ou améliorer la condition physique.
- Un suivi par une nutritionniste : pour maintenir le corps en forme pendant les traitements
- Onco-sexologie : pour aborder les questions liées à la sexualité et à l’intimité.
Ces services sont présents dans des centres spécialisés comme l’Institut Curie, le Centre Léon Bérard et l’institut Gustave Roussy.
Il existe plusieurs associations proposant un soutien communautaire et jouent un r^ôle important auprès des femmes atteintes de cancer du sein, telles que :
- La Ligue contre le cancer : propose des services d’écoute, d’information et de soutien psychologique
- RoseUp : Offre un accompagnement complets, de la partie des activités du bien-être à la réinsertion sociale
- Europa Donna France : se focalise sur la sensibilisation, l’information aux femmes atteintes de cancer du sein.
- Collectif Triplettes Roses : se met en action pour l’amélioration de la prise en charge des femmes atteintes de cancer du sein triple négatif[1].
Le cancer du sein, reconnu comme une affection longue durée (ALD), bénéficie d’une prise en charge à 100 % des traitements, limitant ainsi les freins financiers. Après la maladie, le retour au travail peut être difficile : des dispositifs spécifiques (aménagements de poste, formations, soutien psychologique) accompagnent les patientes pour favoriser une réinsertion professionnelle adaptée.
Malgré les progrès réalisés, des inégalités persistent dans l’accès aux soins de support. Selon Philippe Bergerot, président de la Ligue contre le cancer, un tiers des patients ne bénéficient pas des soins de support essentiels tels que l’accompagnement psychologique et la prise en charge de la douleur.
De plus, des disparités géographiques existent, notamment dans les zones rurales, où est difficile de trouver des soins spécialisés et des associations accompagnantes.
Malgré les avancées, 1 patient sur 3 n’a toujours pas accès aux soins de support essentiels18 (psychologie, gestion de la douleur).
Les zones rurales restent les plus touchées, avec un accès limité aux spécialistes et aux associations d’aide.
[1] Touche particulièrement les femmes jeunes et restent difficiles à traiter
Quelques témoignages de femmes
- Claire, 42 ans, cadre
« Quand on m’a annoncé mon cancer du sein, j’ai eu l’impression que le sol de dérobait sous mes pieds. La chimiothérapie a été une épreuve difficile, ms j’ai trouvé une force insoupçonnée grâce au soutien de ma famille et de l’équipe médicale. Aujourd’hui, je savoure chaque petite victoire du quotidien. Ce combat m’a appris à relativiser et à vivre pleinement. »
- Aïcha, 55 ans, enseignante
« J’ai découvert ma tumeur lors d’une mammographie de dépistage. J’ai eu la chance que ce soit détecté tôt, ce qui m’a évité un traitement trop lourd. Ce cancer m’a rappelé l’importance du dépistage régulier. Maintenant, j’en parle à toutes mes collègues et mes élèves majeures. »
- Sophie, 37 ans, jeune maman
« Le plus dur a été d’annoncer ma maladie à mes enfants. Je voulais rester forte pour eux, même pendant les jours de grande fatigue. Les associations m’ont énormément aidée, que ce soit pour l’accompagnement psychologique ou pour trouver un soutien concret au quotidien. »
- Marie-Thérèse, 68 ans, retraitée
« On pense toujours que ça n’arrive qu’aux autres, jusqu’au jour le diagnostic tombe. J’ai eu une mastectomie et la reconstruction a été un long chemin. Mais aujourd’hui, je me regarde dans le miroir avec fierté. Ce parcours m’a donné une nouvelle confiance en moi. »
Le cancer du sein peut toucher toutes les femmes. Prévenir, dépister, sensibiliser : un combat que Les Papillons de Jour mènent aux côtés de l’association Prolifique.
SOURCES :
1 https://www.santepubliquefrance.fr/maladies-et-traumatismes/cancers/cancer-du-sein
3 https://www.who.int/news-room/fact-sheets/detail/breast-cancer
4 https://www.nature.com/articles/s41591-025-03502-3
5 https://www.wcrf.org/preventing-cancer/cancer-statistics/breast-cancer-statistics/
6 https://www.ncbi.nlm.nih.gov/books/NBK583819/
7 https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/22543542/
8 https://europadonnaturkiye.org/breast-cancer/
9 https://www.santepubliquefrance.fr/les-actualites/2024/
10 https://www.ameli.fr/etablissement/sante-prevention/depistage-organise-du-cancer-du-sein
11 https://www.medicine.lu.se/article/ai-supported-mammography-screening-found-be-safe
12 https://www.eurekalert.org/news-releases/997332
13 https://www.bcsc-research.org/index.php/bcsc-blog/DBT-lower-CDR
14 https://www.siemens-healthineers.com/fr-ch/mammography/tomosynthesis
15 https://depistage-cancers-idf.com/wp-content/uploads/2024/07/RA2023_REGION_VF.pdf